mardi 28 janvier 2014
Parents : mon fils est-il gay ?
L’essentiel de ce qui suit, mutatis mutandis, vaut aussi pour d’autres situations délicates, qui sortent du modèle standard, et peuvent inspirer à votre enfant la crainte de décevoir vos attentes réelles ou supposées : vocation religieuse, relation avec une personne divorcée, importante différence d’âge… L’état d’esprit qui doit être celui de votre conversation, à la fois honnête et bienveillante, est le même. L’essentiel est de permettre la communication, entre personnes adultes. Il est votre enfant, mais il s’agit aussi d’une personne que vous avez amenée à l’autonomie, donc à la capacité, indispensable, de faire des choix libres et éclairés.
Votre enfant n’a jamais ramené de petite copine ou de petit copain à la maison ? Il communique de moins en moins avec vous ? Il ne parle pas de sa vie privée, de ses amis, de ses fréquentations, il élude le sujet ? Vous êtes tombé sur des indices que vous avez préféré ignorer ? Préférer les hommes ou les femmes n’est pas un choix ; le seul choix est de pouvoir le vivre sereinement, ou devoir le cacher, de peur de réactions hostiles de ceux qu’on aime. Votre rôle est de rassurer votre enfant, et de lui permettre de se confier, car le fait de devoir se cacher de ceux qu’il aime peut être source d’angoisse et de souffrance, alors que votre intention n’est certainement pas de le faire souffrir : vous aimez votre enfant, quoi qu’il arrive. Le contraindre à vivre une vie qui ne lui correspond pas ou à cacher sa vraie vie ne rend service à personne.
Vous vous demandez si votre fils ou votre fille est homosexuel(le) ? Vous vous demandez comment lui en parler, sans le ou la braquer ? Mode d’emploi.
À éviter absolument : "quand est-ce que tu nous ramènes une copine ?" et sa variante: "quand est-ce que tu nous ramènes une copine… ou un copain !" Par cette phrase, même si vous croyez lui tendre une perche, même si vous vous croyez bienveillant, même si vous vous croyez ouvert à toutes les hypothèses, vous lui mettez une pression inutile, vous instillez un doute, vous exprimez une attente, vous mettez en cause sa normalité, sans le moindre du monde le rassurer sur vos intentions ou votre disposition à son égard. Il est adulte en ce qu’il est amené à vivre sa vie selon sa propre personnalité, mais il reste votre enfant en ce qu’il recherche votre approbation, ou redoute votre désapprobation et la rupture qu’elle pourrait provoquer.
Préférez ces phrases, parmi lesquelles vous pouvez piocher :
Nous t'aimons tel que tu es : nous aimons une personne, pas l’image que tu renvoies ou crois devoir renvoyer. Nous voulons que tu te sentes libre de nous parler de tes soucis, de tes préoccupations, de ta vie, de tes choix, même s’ils diffèrent des nôtres.
Nous savons que la vie est plus complexe et plus passionnante que des modèles simplistes auxquels il faudrait se conformer. Autour de nous, nous avons une grande diversité de situations personnelles et familiales, de gens auxquels nous tenons.
Nous voulons que tu puisses t’épanouir, être pleinement toi-même, seul ou à deux. La personne qui te rendra heureux nous rendra heureux.
Notre principal préoccupation, c’est ton bonheur : ce qui nous importe, c’est que tu sois heureux.
Tu peux nous parler, tu n’as pas à craindre notre réaction.
Tu peux nous parler, si tu le veux, et quand tu le veux. Nous ne sommes par là pour porter un jugement ou désapprouver tes choix, quels qu’ils soient ; pour nous, la communication, l’échange avec toi est ce qui prime. Entre adultes, nous pouvons accepter des divergences d’orientations politiques, religieuses, ou concernant ta vie personnelle.
Vous pouvez même y aller plus franchement : ce qui nous importe, c’est que tu sois heureux, que ce soit avec un copain ou une copine.
S’il vous dit son homosexualité :
Si vous lisez ce billet, c’est que vous vous posez déjà des questions ; alors ne prenez pas une mine étonnée s’il vous le dit. Votre réaction le marquera durablement ; c’est un moment fondateur de votre relation à venir. Vous devez vous y préparer, et le cas échéant vous employer à rassurer votre enfant alors qu’il vous a fait une confidence qui était difficile pour lui :
Merci de nous avoir parlé. Merci de ta confiance. Notre relation n’est pas altérée, elle est enrichie. Elle est plus vraie, plus sincère, plus authentique.
Nous savons que l’orientation sexuelle n’est pas quelque chose qui se décide ; la seule chose qui se décide est de l’accepter ou non. Nous voulons que tu puisses être en accord avec toi-même.
Intéressez-vous à ce qu’il vit : Tu as quelqu’un ? Tu es célibataire ?
Selon la réponse : comment s’appelle-t-il ou elle ? nous serions heureux de le ou la rencontrer ;
ou : nous espérons que tu rencontreras quelqu’un qui te rend heureux.
Nous sommes de ton côté quoi qu’il arrive. Nous ne sommes sûrement pas pour te compliquer la vie. N’écoute pas les discours hostiles. Nous savons que tu es quelqu’un de bien. Nous sommes fiers de toi.
Sens-toi à l’aise pour nous parler de ce qui va bien, mais aussi si ça va mal, si tu as des difficultés.
Nous n’avons pas de préjugés, mais sans doute beaucoup à découvrir, si tu nous y aides.
Nous n’avons aucune gêne concernant le regard de la société. La société reconnaît enfin pleinement les mariages de couples de même sexe, et a beaucoup améliorer la protection juridique des familles atypiques, même s’il reste encore du chemin à faire.
De nombreux parents expriment à cette occasion des inquiétudes pour le bonheur de leur enfant, qui marquent durablement : peur qu’il soit seul, peur qu’il soit malheureux. Même si vous aviez de telles craintes, n’exprimez pas d’inquiétude pour son bonheur : s’il est homosexuel, c’est ainsi qu’il est heureux. Il sera d’autant moins seul ou malheureux qu’il pourra vivre à l’aise, en se sentant mis en confiance par sa famille. Par ailleurs, un homosexuel n’est pas stérile : il peut et pourra avoir des enfants, ou en adopter.
Concluez votre échange par un geste d'affection, par exemple en lui posant la main sur l’épaule : montrez lui, par un contact physique, et non seulement verbal, qu’il n’y a pas de distance entre vous, que cette discussion vous rapproche.
Enfin, il nous faut parler du lien entre homosexualité et santé, au sujet duquel il y a des faits et des préjugés. La communauté homosexuelle a été la plus durement éprouvée par le sida, et le VIH a encore une forte incidence. Non, tous les homosexuels ne sont pas séropositifs, et votre enfant ne l’est probablement pas.
Je ne suis pas inquiet pour ta santé, et je sais que c’est un sujet qui n’est pas facile à aborder. Mais quelle que soit ta vie sexuelle, j’aimerais que tu te protèges, pour ton bien, et celui de ton ou ta partenaire. Mets des préservatifs. Fais des tests réguliers, au moins une fois par an si tu as une vie sexuelle active. Si le test devait un jour être positif, nous serons évidemment à tes côtés, pour te soutenir. Les maladies se soignent, si elles sont prises à temps. Encore une fois, nous t’aimons tel que tu es, pas autrement. Tu peux nous en parler.
Vous voilà parés pour la grande conversation. Merci de vos commentaires, que vous soyez concerné en tant que parent ou en tant qu’enfant. Et vous, parents, quelles paroles conseilleriez-vous à vos enfants dans une telle situation ?
lundi 20 janvier 2014
lundi 6 janvier 2014
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